Les effets attendus et inattendus d’une pandémie sur la transmission d’entreprise

Les effets attendus et inattendus d’une pandémie sur la transmission d’entreprise
février 4, 2022 Alexandre Gobelin
Entreprise à acheter- achat de société. Vendre mon entreprise. Acheter une entreprise.

Nous traversons depuis deux ans une pandémie, à la fois médicale, culturelle, politique et médiatique. Loin de dissocier le vrai du faux, ou de vouloir accorder les pro et les antis, concentrons-nous sur quelques faits et regardons comment le marché de la fusion acquisition s’est comporté ces deux dernières années.  Quels ont été les impacts sur la valorisation des entreprises ? Comment se sont comporté les vendeurs et les acquéreurs ? Comment le milieu bancaire a traversé cette crise ?

 

La pandémie fut déclarée en Suisse début Mars 2020. A grands renforts de communication, les politiques et les médias se concentrèrent exclusivement et quasi H24 sur la pandémie du SARS-CoV-2. Au sommet de leur art, les médias incrustèrent le compteur de décès en temps réels. La COVID 19 était née et bien née !

 

La Chine confina sa population, et le reste du monde lui emboita benoitement le pas. Les travailleurs furent priés de rester chez eux, et beaucoup d’entreprises furent arrêtées. La population quant à elle apprenait à passer des heures dans les queues pour obtenir un précieux paquet de pâtes ou de papier hygiénique en prévision de la grande famine à venir (mais en gardant son séant propre !)

 

Depuis deux ans nous vivons bon gré mal gré avec cette nouvelle variable. Il y eu des hauts, des bas, et au final, hormis la création et la dilapidation de quelques milliards de réserves ou de nouveaux billets, l’économie suisse survécu à ce fléau, ainsi que sa population, surtout chez les moins âgés.

 

L’économie suisse fit preuve d’une étonnante résilience et nombreuses furent les entreprises actives qui connurent une excellente année. Dans le marché de la fusion acquisition, les deals en cours furent stoppés nets, « faute » aux acquéreurs, pris de panique qui gelèrent immédiatement leurs opérations. Il est totalement normal et attendu que les acheteurs se raidissent en cas d’incertitude économique à moyen et long terme. Alors dans un contexte de « fin du monde », les projets d’acquisition perdirent pas mal de leur attrait.

Plus inattendu, chez SELLSIDE, cette pandémie créa un surplus significatif de travail. En effet, les acquéreurs n’abandonnaient pas l’idée d’acquisition mais voulaient simplement être rassurés. Dès l’été 2020, l’espoir revenait, et les résultats étaient au rendez-vous.

Du coup, nous avons accompagné les vendeurs et acquéreurs en procédant à des clôtures et des budgets trimestriels, en suivant de près le cash-flow de l’entreprise, et bien entendu en « profitant de ce délai » pour exécuter des due diligences pour le moins fouillées.

 

Au final cette pandémie permit de renforcer les liens de confiance entre acquéreurs et vendeurs. Ces liens sont LA base et LA condition sine qua non d’une bonne transmission. Les acquéreurs savent très bien qu’ils traverseront d’autres tempêtes et le fait de voir comment une entreprise crée de la confiance en l’avenir. Étonnamment lorsque l’on vend une entreprise en bonne santé financière, par exemple bénéficiant de 3 à 5 derniers exercices en croissance constante, les vendeurs cherchent à remonter le temps pour trouver trace des dernières difficultés. Une fois un vendeur est remonté jusqu’en 2009 pour trouver un exercice plus difficile. Nous lui avons fourni ces données qu’il a de lui-même considéré comme obsolètes et non signifiantes quant à l’avenir. Cependant en discutant cet acquéreur a expliqué que sa démarche ne consistait qu’à le rassurer quant à la capacité de sa future entreprise à traverser une crise.

Une fois encore, l’écoute de l’acquéreur est primordiale. C’est pourquoi chez SELLSIDE, même si nous ne représentons que des vendeurs, nous considérons que notre rôle est de mettre de l’huile dans les rouages et certainement pas d’être en défense face à un acquéreur. Comprendre les craintes et les besoins des uns et des autres et les formaliser dans la structure financière et juridique du contrat de cession de parts ou d’actifs est la clé pour conduire l’opération sereinement et la clore.

 

Cette pandémie, donc, nous fournit une crise en temps réel et permit aux acheteurs et aux vendeurs de travailler ensemble sur les solutions à mettre en place. De manière plus inattendue, nous avons impliqué les banques lorsque les transactions s’opéraient en montage LBO (Leverage Buy Out : Achat financier par emprunt bancaire). Celles ci nous ont aidé et ont aussi pu faire part de leurs visions et de leurs craintes. Une fois dissipées et comme elles se sont retrouvées assises sur énormément d’argent à investir et peu d’affaires en face, les montages financiers et les accords afférents furent plutôt plus faciles qu’en temps normaux.

 

Du côté de la valorisation des entreprises, la pandémie fut neutre, voir bénéfique.   Des résultats inférieurs étaient relativement faciles à normaliser, des résultats équivalents sonnaient comme une excellente nouvelle et des résultats meilleurs qu’en 2019 (ce qui arriva souvent) furent accueillis en grande pompes.  Au final, le premier trimestre 2021 fut consacré aux clôtures annuelles et à la clôture de l’acte de vente, toujours (chez SELLSIDE) avec nos acquéreurs initiaux.

 

Ce que nous n’attendions pas, mais alors pas du tout, en revanche, fut la réaction de nombreux vendeurs en 2021. Après une année blanche, au niveau des vente en 2020, et donc d’ascenseurs émotionnels importants, beaucoup décidèrent de surseoir à la vente. En effet les entrepreneurs ayant traversé la crise avec brio ont souvent retrouvé la fierté et la flamme de posséder et de diriger « un petit bijou » (dixit), qu’ils avaient perdu avec le temps. Les transmissions seront donc décalées de quelques années, le temps pour les entrepreneurs de savourer leur succès bien mérité et pour les acquéreurs de suivre posément leur cible.

Alexandre Gobelin
Fondateur
Sellside Sarl